Suite au formidable succès rencontré par l’exposition temporaire, le musée de Baulmes réouvre ses portes en septembre 2022.
Dans les années 60, la paye du lait ne garantit plus un revenu suffisant aux familles paysannes suisses qui en dépendent. Différents facteurs sont à l’origine de ce problème rencontré par les éleveurs, mais une des causes les plus fréquemment évoquée à l’époque est l’utilisation de méthodes de sélection peu efficaces, voire délétères, pour améliorer le bétail laitier. En effet, on sélectionne alors ce dernier principalement sur l’apparence des animaux et très peu sur la productivité de leur descendance. Ce problème de sélection, couplé à une période de fort renchérissement propre au Trente Glorieuses et une réglementation sur l’élevage extrêmement contraignante, conduit une poignée d’éleveurs du Nord vaudois à revendiquer des changements substantiels des pratiques et statuts de l’élevage suisse. Ces paysans «progressistes» (selon le terme consacré de l’époque) souhaitent notamment améliorer rapidement les qualités laitières de leurs troupeaux, quitte à importer du bétail et des semences de l’étranger.
Les autorités et syndicats d’élevage de l’époque conviennent qu’il faut des changements, mais imposent une lente prudence face aux épizooties et erreurs de sélection. Ils sont par ailleurs très attachés aux races bovines suisses et, de ce fait, tout à fait opposé à l’importation à grande échelle de bétail ou de semence étrangère. Face à ce refus des autorités, tant fédérales que cantonales, certains éleveurs vont alors s’organiser et chercher illégalement en France ou Allemagne voisine des solutions à leurs soucis de productivité.
La Guerre des vaches est donc ce moment où, entre 1964 et 1967, les passages en fraude à la frontière avec du bétail bovin ou de la semence sont de plus en plus médiatisés, de même que les revendications pour une révision des critères sélection du bétail. La pression augmente du côté des éleveurs progressistes, mais aussi des douanes qui font tout pour stopper les contrebandiers à leur arrivée sur le territoire. Certains éleveurs se font donc attraper, parfois plusieurs fois, et reçoivent des amendes salées. D’autres encore sont emprisonnés quelques jours, voire blessés par des balles tirées par les douaniers! Le bétail saisi est la plupart du temps refoulé ou abattu. Les semences saisies sont confisquées et parfois détruites. Pourtant, beaucoup de bétail et de semences finissent par arriver sans encombre dans les troupeaux romands.
Le paroxysme de la Guerre des Vaches est probablement atteint en mai 1967 lors du “passage en force” à la douane du Creux (Vallorbe). Entre 200 et 300 paysans forcent le passage avec une douzaine de vaches françaises. Face à eux, des douaniers, armés, prêts à en découdre ! Cet événement sera probablement l’électrochoc qui fera bouger les lignes et initiera la modernisation des méthodes et statuts de l’élevage en Suisse.
A l’aide de reportages télévisés et d’articles de presse de l’époque, l’exposition retrace ces années aventureuses dont quelques paysans de Baulmes et ses environs furent les acteurs. L’exposition met aussi en valeur le témoignage de M. Louis Cachemaille, un de ces paysans du «clair de Lune», qui explique comment lui et son frère César en sont venus à prendre autant de risque pour rendre possible une vie décente à la ferme.